INTRODUCTION À LA FLORE VASCULAIRE TERRESTRE DE TROMELIN
Préambule
L'index des trachéophytes des îles Éparses (listes détaillées de la flore vasculaire terrestre par territoire et pour l'ensemble des îles) est disponible en téléchargement (BOULLET V. & HIVERT J., Index des Trachéophytes des îles Éparses - mise à jour : 26 novembre 2024)
Grâce à un important travail de détermination et de mises à jour taxonomiques réalisé par Vincent BOULLET, cet index est régulièrement reversé dans le référentiel national TAXREF.
Un article traitant de la flore vasculaire terrestre des îles Éparses a été publié dans la revue Atoll Research Bulletin : BOULLET V., HIVERT J. & GIGORD L., 2018. An Updated Account of the Vascular Flora of the Iles Eparses (Southwest Indian Ocean). Atoll Research Bulletin. 1-64. 10.5479/si.0077-5630.614.
Ces données concernent uniquement les taxons recensés avec certitude (= exclusion des mentions douteuses ou anciennes pour lesquelles les taxons n’ont pas été retrouvés récemment). Elles sont provisoires et peuvent évoluer en fonction de l’examen des échantillons en cours de détermination et selon l’acquisition de nouvelles connaissances et les évolutions taxonomiques et nomenclaturales.
Mise à jour : novembre 2024
La flore vasculaire terrestre de Tromelin se compose de 28 taxons regroupés au sein de 21 familles botaniques.
Ils se répartissent en 8 indigènes (29%), 19 exotiques (68%) et 1 cryptogène (3%).
Il convient de noter que parmi l'ensemble de ces taxons 14 sont considérés à ce jour disparus et 1 supposé disparu. Il s’agit principalement de taxons exotiques (13), certains ayant été introduits à l’époque des météorologues pour un usage alimentaire ou ornemental puis morts naturellement (Avocatier, Bananier, Filao, Papayer, Tamarin, Vacoa), et d’autres ayant périclité à la suite d’actions de lutte (Aloès amer, Badamier, Boerhaavie dressée, Cactus sémaphore, Jean-Robert [disparition à confirmer], Panicum, Ti trèfle). C’est également le cas pour 1 taxon cryptogène, Fimbristylis cymosa (observé en 2020 sur la zone d’atterrissage de l’hélicoptère mais jamais revu depuis) et pour 1 taxon indigène, la Patate à Durand (observée par les météorologues mais jamais revu depuis hormis à l’état de germination dans les laisses de mer).
C’est le territoire qui présente la plus faible diversité floristique parmi les îles Éparses.
La flore indigène de Tromelin est pauvre, ce qui peut s’expliquer par les dimensions réduites de l’île (environ 1 km2), par son isolement géographique et par ses conditions environnementales très rudes.
Au niveau de leur distribution géographique, on constate qu'environ deux tiers (62,5%) des taxons indigènes ont une aire biogéographique relativement vaste, de type cosmopolite, pantropicale ou indo-pacifique, et que 25% sont inféodés à l’ouest de l’océan Indien.
Enfin, 1 taxon est strictement endémique de Tromelin.
Sur le plan patrimonial, la flore indigène de Tromelin se distingue par la présence de Boerhavia sp.2, une endémique stricte en cours de description.
Elle est également marquée par Portulaca mauritiensis var. aldabrensis qui était considérée jusqu’alors comme endémique de certaines iles coralliennes des Seychelles (Aldabra, Assumption, Cosmoledo, Farquhar). Enfin, Triumfetta procumbens (Malvaceae) présente une certaine valeur patrimoniale compte tenu de sa faible répartition à l'échelle régionale et nationale.
Au niveau des statuts de menace, parmi les 8 taxons indigènes, 2 sont considérés comme menacés d’extinction à Europa. Il s'agit de Portulaca mauritiensis et Triumfetta procumbens qui sont jugés en ‘Danger critique’ (CR).
Les taxons CR présentent des effectifs en individus matures très réduits (< 50) et un nombre de stations très faible.
Les autres taxons ont été catégorisés en ‘Préoccupation mineure’ (LC ; n = 3) ou en 'Données insuffisantes' (DD ; n = 2) ou en ‘Non applicable’ (NA ; n = 2 ; cas d’une espèce casuelle aujourd’hui disparue et d'un taxon cryptogène uniquement présent à l'état végétatif).
La flore exotique de Tromelin est largement dominante en termes de nombre de taxons (n = 19), bien que 12 d'entre eux ont aujourd'hui disparu (espèces anciennement introduites et cultivées ou espèces introduites involontairement) et que 4 sont en cours d’éradication (Euphorbia hirta, Lepidium englerianum, Lepidium virginicum et Parthenium hysterophorus) et qu’un taxon est en cours de contrôle (Cocos nucifera).
6 taxons ne sont pas spontanés, c’est-à-dire présent uniquement grâce à l’intervention de l’homme, tandis que 13 sont localement naturalisés et se cantonnent autour des zones de vie.
Sur le plan des invasions végétales, la grande majorité des taxons exotiques ne présente pas de capacité d’invasion significative (11 taxons, soit 58% des exotiques). Seuls 7 taxons apparaissent faiblement envahissants (Cocos nucifera, Consolea falcata, Euphorbia prostrata, Lepidium englerianum, Lepidium virginicum, Oxalis corniculata et Parthenium hysterophorus) alors qu'1 taxon est jugé comme moyennement envahissant (Euphorbia hirta).
L’analyse des statuts de culture de la flore vasculaire de Tromelin met clairement en évidence la volonté de plantation de plantes alimentaires et ornementales des personnels se succédant sur ce minuscule territoire particulièrement hostile.
En effet, on constate que 10 taxons (soit 36% de la diversité floristique globale) sont présents à l’état de plantation à vocation ornementale ou alimentaire. Ces plantations, aujourd'hui révolues, ont été réalisées à petite échelle, à proximité du camp météorologique. On peut noter que la majorité des individus cultivés présente un état sanitaire guère satisfaisant et que dans bon nombre de cas ces plantations n'ont pas tenu dans le temps (hormis Cocos nucifera).
Les données floristiques historiques (relevées dans la littérature ou au gré d'entretiens avec d'anciens météorologues) réalisés en 2011 et en 2013 ont également permis de relever la présence ancienne de quelques plantes cultivées en pots : Ananas comosus (Ananas), Capsicum frutescens (Piment-oiseau), Carica papaya (Papaye), Citrus cf. sinensis (Oranger), Curcuma amada (Gingembre-mangue), Piper nigrum (Poivre noir), ou encore Solanum lycopersicum (Tomate). Là encore, le taux de réussite est globalement très faible.
En termes de similarités floristiques entre la flore de Tromelin et celle des autres îles Éparses, on peut constater que :
- 13 taxons (4 indigènes, 1 cryptogène et 8 exotiques) sont également présents sur Europa, soit 46% de la diversité floristique globale
- 15 taxons (5 indigènes et 10 exotiques) sont également présents à Juan de Nova, soit 54% de la diversité floristique globale
- 16 taxons (6 indigènes, 1 cryptogène et 9 exotiques) sont également présents aux Glorieuses, soit 57% de la diversité floristique globale.
Pour information, un taxon recensé anciennement et non revu récemment n’a pas été retens au cours de cette analyse car présentant un doute sur sa détermination et/ou sur sa présence sur le territoire. C’est le cas d'Achyranthes aspera pour lequel nous ne pouvons donc conclure sur son statut (erreur de détermination ou taxon correctement décrit mais aujourd’hui disparu ?).
Dans le cas d’une procédure de détection précoce de la flore spontanée, quelques taxons ont été relevés ponctuellement au stade de plantule mais n’ont pas été retenus dans cette analyse car ils ne sont pas naturalisés (morts naturellement avant d’atteindre un stade reproducteur ou à la suite d’une action rapide de lutte) : Argemone mexicana, Arivela viscosa, Entada rheedei et Hernandia nymphaeifolia.
Enfin, les relevés effectués sur les diaspores ramenées par l'océan au niveau des laisses de mer s'avèrent pauvres aussi bien en termes de taxons qu'au point de vue quantitatif (seules quelques semences d’Aleurites moluccanus, Barringtonia asiatica, Calophyllum inophyllum, Cocos nucifera, Dioclea spp., Entada rheedei, Erythrina cf. variegata, Guilandina bonduc, Hernandia nymphaeifolia, Ipomoea pes-caprae, Ipomoea violacea, Mangifera indica, Mucuna gigantea, Mucuna spp, Prunus persica, Terminalia catappa et Vigna marina ont été trouvées). Quelques germinations d’Ipomoea pes-caprae ont été observées in situ sur les hauts de plage, mais les plantules n’ont pas survécu (probablement consommées par les bernards-l’hermite).